vendredi 5 décembre 2008

Politics of knowledge : intervention postcoloniale sur le savoir-pouvoir

La lecture de Bhabha est extrêmement lente, faisant écrire énormément ; faisant passer par des plans nombreux et chaque fois d'une densité extrême. D'autant plus dense qu'elle est peu fléchée : des fourrés, des taillis, d'hypercultivation - comme Derrida parle d'hypercorrection de son français d'Algérie. Situation coloniale/postcoloniale d'énonciation théorique.

En particulier, à déployer à travers elle : l'importance, l'intervention (si c'est une des choses que R. Young continue à partir de Bhabha : Bhabha proposant l'intervention du postcolonial dans le poststructural ; Young proposant l'intervention comme titre du travail de sa revue, application continue, périodique, de la question du postco) - l'intervention, donc (ou encore : agency, political and critical) du postcolonial comme question, joue au maximum sur la question du savoir-pouvoir, et son compact actuel. Le postcolonial donc, à faire travailler, pour une prise sur la "société de la connaissance" comme modèle culturel en processus d'empire : comme idéologie, et comme géopolitique. Le postcolonial comme, bien planté dans sa généalogie en Said et Foucault, stratégie de visibilité du colonial comme politique culturelle et cognitive, politique scientifique. Le colonial comme politique du savoir. Et le postcolonial comme déclinaison contemporaine du capitalisme/libéralisme (l'état dans lequel la Guerre froide laisse derrière elle le rapport de force international)
La référence psychanalytique, et la thématique identitaire, sont des effets, pratiquement secondaires. C'est la question du savoir qui fait crux, et prise critique. Comment, par exemple, the gaze est moins (malgré les développements qui le prennent pour thème, et objet) une question du visuel comme scène de l'identité/subjectivation, qu'une question de la surveillance, et de la discipline, au sens fort de Foucault. La visibilité comme mode social du rapport de force. Toujours, éviter de faire retomber la lecture de Bhabha du côté de l'identité (pourquoi y faut-il un effort? Effet de réception, ou effet interne? à voir), c'est-à-dire du côté de la culture. Car la prise est celle du culturel sur le politique. Le travail de lecture doit être ce suivi du politique dans.
Voir aussi, comme ingrédient de ça : comme dans le concept de "sujet colonial" est constitutif une sorte d'indécision sur son incarnation historique, ou théorique : qui est le sujet du "stéréotype", du "mimétisme", de la dénégation, de l'ambivalence etc.? Justement là, cette mobilité là : que le sujet colonial est un rapport. De domination, et de discipline. (Ni le colonisateur, ni le colonisé.) D'où aussi l'intérêt pour ces figures des "class of interpreters" (Macaulay) et "corps of translators" (87), ces sujets "partiels" et intermédiaires, qui habitent la farce coloniale (force et farce : c'est ancré dans Marx. C'est la nature politique du terrain où se travaillent ces questions).

Le problème de la "Postcolonial theory" comme formation discursive, et sa critique arasée par la pratique institutionnalisée : une possible dépolitisation, par la thématique de la culture. Différence des cultures, logiques de l'identité.
Or son point de travail est à garder dégagé : il regarde à l'articulation (la nature du rapport étant à penser, "articulation" étant comme un X pour marquer l'inconnue) du culturel et du politique. Politique de la culture, politique du savoir, politique scientifique. Le politico-culturel (voir sur Taguieff, aussi. Et sur l'importation en France, Compagnon passeur minorateur, des Culture wars américaines sous la question de la Culture générale, ou humaniste : cf sa recension de Nous autres, modernes, de Finkielkraut, dans le Monde du 6 oct. 2005, sous le titre "La Bataille des modernes.)

"The Politics of Knowledge" étant bien sûr Said, en anthologie dans The Fall into Theory.

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