mercredi 29 juillet 2009

Agenda : agency & agencement

Est-ce que je l'ai déjà noté ici? A faire à calculer à mettre à l'épreuve : le rapport entre agency et agencement. Voir ce qui se passe quand on rapporte l'une à l'autre les perspectives de Deleuze-Guattari-Kafka, et Bhabha (mais il n'est pas exactement le point d'origine : par lui, y remonter. Généalogie dans les relectures postco des théories de l'idéologie : Althusser? Spivak, Perry, Slemon).
Passer aussi, pour la petite histoire et le symptôme, par la traduction de Bhabha (et Spivak) en français.

Tranchants du postcolonial - avec le Companion de Lazarus

Definitely : le tranchant des questions posées autour du postcolonial et ses institutionalisations comme question, se concentre autour du savoir-pouvoir comme une pointe du contemporain.
Et : qualité remarquable du Companion de Lazarus. Lazarus lui-même (en particulier sur la droitisation, culturisation des enjeux de la mouvance critique/académique postcoloniale, par rapport aux anticolonialismes ; et le tournant post-89 pris par le mode des ajustements dépolitisants), Benita Parry (qui reprend en les aiguisant les enjeux du linguistic ou theory turn du POCO comme moyen de détourner le regard des perspectives matérialistes ; réconciliation, révisionisme), John Marx : qui en arrive aux noeuds d'enjeux des révisions canoniques par la littérature postcoloniale : et s'enfonce dans ses lieux tiraillés : Achebe/Ngugi sur l'anglais et la Littérature anglaise, Jameson/Ahmad sur le rapport mondial des luttes ou leur spécificité, noeud critique autour de The Tempest et ses réécritures ; autour de Heart of Darkness et ses réécritures, échauffements autour des compromissions de la littérature avec la classe universitaire mondialisée.

. question de la "situation de l'intellectuel" 2009 - "comprador intelligentsia" et ses variations et actualisations encore. Elément dans un système non seulement de globalized academia (ce serait seulement la dénoncer comme un faux : critique par le pseudo- seulement), mais de global cognitive capitalism (l'analyser comme telle, partie prenante, avec les flux de responsabilité - complicités, derivativeness, résistance - tout à déchiffrer à neuf).

. question du marché littéraire transnational, et les constantes actualisations des dynamiques de pouvoir dans la République mondiale des lettres (Casanova). "A stridently élite category", "a global class". (John Marx souligne, dans Lazarus ed.) Supposant un lectorat canonically educated, et orientation vers public occidental ou occidentalisé. Certainement, les bestsellers produits de ce marché global. Ce qui n'empêche pas entièrement la littérarité.

. question de la nouveauté, spécificité, du rapport de la littérature à l'academia. Avec justement - ici criticité du comparatisme - des nouages différents dans les anglophonies et les francophonies culturelles/nationales et universitaires contemporaines. Nouveautés du rapport littérature et pouvoir et culture. Le prendre pour tel, et cesser d'espérer aucun dehors, pour prendre bien le mouvement, on the flat, in the crowd, half blind with dust.

mercredi 22 juillet 2009

Agenda : His man

Note : il faut écrire les rapports entre Mrs Brown, figure fictionnelle de la dispensation moderniste (de même, le "she" de Mrs Dalloway et les "three Mary's" de A Room), et Friday, ou plus précisément peut-être "his man" de Coetzee. Pour une actualité de la minoration (de l'apartheid, la censure, mais aussi, plus fin et postcolonialement, de la nation et ses récits de philosophie politique ; ses discours de démocratie). Justement comme pas des allégories, mais bien des personnages et des modes du personnage. Tropes romanesques profonds, qui déracinent des natures du roman ; pour le moderne ; pour le ?? - quoi, dans le cas de Coetzee?

#2. His man est aussi, par contiguïté, writes-his-man, et this-man-of-his. (Nobel lecture).

#3. Il faut voir en rapport avec la civility suggérée comme point d'attention par Bhabha - avec le personnage et le sujet dans Coetzee. En rapport avec une actualité de la question, par ses émergences dans les formes mondiales de undocumentedness. Friday ouvrant par là une série où viennent peut-être se placer la jeune Barbare et certainement Michael K, la Marijana croate de Slow Man ; autrement la femme, latino-américaine?, du Diary - et une fonction poétique de l'Australie - puisque qu'elle est inscrite dans l'oeuvre à partir de Slow Man, puis dans le Diary.
Susan Barton, féminisation du rapport de fiction de Robinson Crusoe, était déjà une expérience du déport de la civility ; par ici aussi, une série (Martha, Elizabeth Curren, Elizabeth Costello, les femmes (la femme aux chiens) de Disgrace?)

lundi 20 juillet 2009

Postcolonial et culture, dépolitisation - Lazarus

Ce que fait Lazarus avec son projet éditorial du Cambridge Companion to Postcolonial Literary Studies de 2004 : repolitiser l'appréhension des thèmes et des débats de la "postcolonial perspective" (puisque c'est en effet avec Bhabha qu'il fixe l'orientation de la discipline née au bout des 70s), en finesse.
L'introduction place la voix devant une série de noeuds qu'elle indique et dont elle analyse l'enjeu :

1. contexte de savoir-pouvoir des années 1970 : culturalisme du postcolonial criticism - et les 1970s comme époque de dépolitisation : il y a du savoir et de l'intérêt sur le postcolonial dès les années 1970, où "postcolonial" est seulement historique et factuel ; le terme se charge en idéologique avec le "sea-change" (4) de la fin des 70s. C'est avec Bhabha qu'il marque le basculement, et dans les termes du passage d'une cible critique (class analysis) à une autre ("the discourse of 'minorities'", "critical revisions" et "postcolonial criticism" - Bhabha). Le "sea-change" est donc clairement fléché comme autre chose que le simple nouveau projet, post-indépendances, de l'anticolonialisme : il est post-marxiste, post-modernité ; caractérisé par une "aversion à la dialectique" et aux significations sociales holistes (4) et ouvert sur migrancy, diaspora, hybridity, liminality. Passage, aussi, d'une pensée du pouvoir et du politique comme conflit, à celle de la "différence culturelle", l'ambivalence, la complexité.
La contextualisation qui va avec alors, l'associe aux années 1970 comme celles d'une "reassertion of imperial dominance", "that is, of the global re-imposition and re-consolidation both economically" (unilateral capital) and politically (interventionist "New World Order" from the US). "Containment and recuperation of the historic challenge from the third world" / decolonization since 1945 (5 - la thèse n'est pas loin des retournements et instrumentalisations mis au jour par Boltanski pour ce qui concerne le trope révolutionnaire de la critique 60s, dans Le Nouvel esprit du capitalisme). Postcolonial theory & studies, visibles alors comme "a monumentalization of this moment - a rationalization of and pragmatic adjustment to, if not quite a celebration of, the downturn in the fortunes and influence of insurgent national liberation movements and revolutionary socialist ideologies in the early 1970s". 1975, and then 1989.
=> Anti-nationalist, and anti-Marxist disposition ; and intellectual position (issue in debate : "the class position of its leading practicioners" - "class" here, who says?) : not exactly "comprador intelligentsia", rather "the condition of the intelligentsia of global capitalism". (5)
Il y a bien ce passage du politique (Guerre froide et Tiers-Monde) au culturel-comme -capitalisme (ou hommisme). Soft power, soft politics. Voir aussi la diversité comme déflection du différentiel de pouvoir? Et la situation de l'intellectuel dans une actualité (mondialisée) des rapports savoir-pouvoir.

=> Agenda : non pas se faire coincer dans (ce serait encore un déterminisme sociol-pol), mais faire l'histoire de, cette situation de l'intellectuel 2007, et de celle du champ : histoire "global and politico-economic as well as more concretely institutional and academic-theoretical" (7).

2. élite and popular - sociology : comme il devient visible après les indépendances, le différentiel de pouvoir ne passe pas seulement entre colonisateur à colonisé, mais se conjugue aussi à la ligne maintenue ou produite entre élite et les "disenfranchised sectors of the society" : grosses majorités. Soulevant : "the question of 'the people' " (8). Projects for recovering and adequately theorizing popular consciousness and popular practice : histories from below, insurgent sociologies, new approaches in pol economy, mould-breaking developments in anthropology, feminist & environmentalist work in social sciences etc. "Such is the culturalist emphasis in postcol studies, however, that little of this pioneering work" in known. (9) Subaltern Studies, hijacked by the Spivak twist on it : unrepresentable, irreducible gap ; fetishizing of difference.

=> issues here : 1. epistémol : adequacy, rather than conditions of possibility, of reprensentation ; 2. méthodol : relation between theory and practice.
J'ajoute mes repères : Young et son projet marxien ; Derrida comme pôle culturaliste pour les postcol, Spivak y étant articulatoire ; Ashis Nandy et des tentatives pour renégocier le culture et le politique, entre Gandhi et Kipling, délicat. A placer aussi pour clarifier : un moment "cultural studies" britanniques des postcolonial studies.

3. l'Europe toute-eurocentrique : faire le départ entre l'eurocentrisme comme idéologie (passible d'une critique au sens kantien : idéologie dominante, et non totale), et comme épistémè (au sens Foucault, comme tout-déterminante), qui donne à confondre la modernité avec le projet de la modernité, et l'eurocentrisme avec l'Europe-même. Voir la critique que fait Habermas. Résultat dans des plausibilités de "disavow modernity, Europe, rationality themselves, as all inherently imperialistic and totalitarian". (13) => vu comme "sheer will to power".
Repose sur deux lectures de Said (l'Orient existe en dehors de l'orientalisme // l'Orient créé de tte pièce par, pas de hors D...). Misreading.
Trope de l'invention : Inventing India (1992), Imagining India (90), Inventing Ireland (95), Writing Ireland (88), The Invention of Africa (88).
Trope des totalisations : Chakrabarty (2000), Young (White Mythol),

4. littérature contemporaine, littératures postcoloniales : decentring, of all levels : reading, writing, publishing, criticism, Nobel etc. On n'ajoute pas ce corpus à l'étude de la littérature : il déplace les discours sur le littéraire même, même hors de toute référence à l'empire.

5. travail ici, sur le champ : introduire des concepts et débats, les situer dans l'institutionnel, les contextualiser dans le socio-politique.
Dont : nationalisme anticolonial, décolonisation, mondialisation, migrations, et brain drain.
Y compris une "Indicative chronology" qui cherche explicitement à être "authoritative".

Termes de Lazarus : "implications for politics and theory" ; "a field currently alive with activity and invention." (16)

Remarque 1. Lazarus vs Young : la proposition est donc inverse, sur le rapport entre luttes anticoloniales et postcolonial studies comme prolongement ou déflection du marxisme qui leur était inhérent.
Remarque 2. Drôle de statut, cette question du littéraire, qui est donné comme point de départ et terrain d'étude ici ; auquel l'introduction rhétoriquement aboutit par simple ordre d'évocation ; mais dont le rapport avec les deux plans du noeud savoir-pouvoir est éludé.

vendredi 17 juillet 2009

Structuralisme et tournant de la traduction

Une séquence à souligner ; sa proposition à présenter, et à élucider : que l'expansion de la thématique universitaire de la traduction, internationale (un comparatisme en serait pertinent), est un épisode nouveau dans une histoire de la pensée du langage, qui peut être post-saussurienne (ou pas : d'autres généalogies, qui se croisent, et sont causes de certaines vues brouillées. Y couper des chemins clarifiés). Le translative turn (comment se rapprocher de cet objet historique, pour en examiner les stratégies? les motivations?) comme "conséquence" "nombrable" celle-là justement (CLG p. 100), de la période du langage (où le structuralisme n'est pas seul, largement ; il faut le prendre en compte), et conséquence qui a une valeur en tant qu'elle n'est pas le backlash observable dans d'autres prolongations, ou après : des "retours" et des ouvertures ou précipitations vers des directions opposées. Qu'elle garde bien la question du langage, et d'une anthropologie linguistique, mais qu'elle force les produits saussuriens à déployer la diversité des langues.
Par ce point de vue, avancer dans la masse en suivant le fil des enjeux idéologiques : quelle conception des rapports entre langage et peuple/culture. Quelles idéologies du langage. Avec leurs incarnations institutionnelles ou de pouvoir.

La littérature, 2009

Comment la façon dont j'envisage l'étude de la littérature anglaise a changé, depuis mes premiers cadres, ou premiers moments d'autonomie. Histoire de génération (et pas seulement), dont je participe. Et trajectoire de lectures régulièrement transformatrices - simplement le travail.
L'étonnement que tant de termes pris pour existants et substantiels - évidences consensuelles qui ayant été établie par des fondateurs pouvaient fonctionner et nourrir une machine professionnelle/intellectuelle - se fragilisent un après l'autre, au fur et à mesure que je les identifie comme coques dépassées. Une carrière entière de ces termes ; on ne manquera pas de ces moules à briser, soigneusement.
Vers quoi ça tend, maintenant : la littérature comme question du public. Ce que je fixe en ligne de mire par "peuple", m'autorisant de Deleuze-Guattari via Kafka, et en prenant en charge, comme problématique, les ambiguïtés idéologiques dont l'histoire du terme est chargé, puisqu'elles m'entraînent dans le sillage culturel épais de ces grandes batailles, Kulturkämpfe européennes (au moins - coloniales, aussi, par coextension). Poème, et poème-langues (histoire-et-comparaison, pointe Monateri dans Comparer les droits, résolument), comme point d'interrogation depuis lequel reprendre une pensée politique, en craquelant soigneusement les attendus de la philosophie politique, du juridisme, qui font la charpente majeure des termes que je ne comprends pas : de ce qui justement est la masse d'obstacle à ce qui me paraît être la vie des peuples. Etat, nation, "politique", "peuple"!, citoyen, société, langue, culture, pouvoir. La littérature comme ressource pour l'anthropologique, contre les grosses masses impénétrables, qui dépossèdent et disempower - sauf par un travail interne, de fouille historique. (Abélès.)

Le point de vue du poème comme dimension du social et du culturel (mais où se pensera en effet la masse? Les puissances massives? Celles que j'ai prises en direct à l'estomac à Hong Kong, ou en entendant A. parler des cursus de formation à l'ESSEC) ; et comme prise pour la modernité, et ses dispositifs agressifs de pouvoir. Y vivre, et y multiplier de la vie. Vivre (et combattre dans) une culture. (There is such a thing as society.)

De là aussi, ou avec ça, un intérêt déplacé, et complètement revivifié (vivant, toujours plus vivant), pour la littérature comme contemporaine. Etre impressionnée par les savoirs anthropologiques qui sont fouillés et carved out, par les oeuvres. Largement loin de la notion très ENS ou "beaux quartiers" (GD) d'un déclin de la littérature - qui est pour sûr un déclin de certains ensembles de valeurs littéraires. (PWL : des littéraires qui "ne s'estiment pas assez".)

mercredi 15 juillet 2009

Tâche, activité, faire

Je ne sais pas depuis quand en France les disciplines sont identifiées par leurs tâches - ni en Allemagne, l'antécédance de l'Aufgabe, positionnée pour le traducteur par Benjamin en 1923, à partir de Baudelaire. Mission, être mandé. Je retrouve Abélès en conclusion épistémologique de Anthropologie de l'Etat (1990) : marquant le souci dans ces termes : "C'est la tâche de l'anthropologue que d'approfondir sans cesse cette investigation des mots, des actes et des intrigues qui font de l'action politique un drame à nul autre pareil." (232)

Dans Saussure, c'est : "ce que fait". Est-ce que ça distingue quelque chose? Les temporalités différentielles entre morale et éthique du travail de savoir. Meschonnic dit "activité" - sans le même concern exactement pour les disciplines puisque son plan de travail est le critique - et mesurer les "conséquences innombrables" de Saussure en suivant les lignes qui traversent les plans disciplinaires, le long des rigoles du langage.
Saussure historien : personne ne mande le linguiste. De même personne n'appelle, Beruf, ce "savant" (Weber). La différence est bien située du côté de pratiques-cum-idéologie (praxis) de l'histoire. Le point de vue n'étant jamais celui de l'avant ou du prospectif : le savoir toujours bien au bout de la phrase. Quelque chose de trop fin, ici, pour le nouer pour l'instant.
Il n'y a pas de devoir disciplinaire. Dette. Mais, disons, la "vie", pour simplement pointer grossièrement un certain mode d'historicité.

NB : Saussure parle bien de "la tâche du linguiste" : "est de définir ce qui fait de la langue un système spécial dans l'ensemble des faits sémiologiques" (CLG p. 33). Et de "Matière et tâche de la linguistique, ses rapports avec les sciences connexes", titre du chapitre 2 de l'Introduction (p. 20).

jeudi 2 juillet 2009

Situation universitaire, UK

Labour Research (juin 2009) rapporte ceci:

UNIVERSITY BOSSES WIELD JOB AXE
A tide of university job cuts across the country has prompted united resistance by
higher education unions the UCU, UNISON, Unite, the GMB and the EIS as well as
the NUS students' union.
The unions are demanding a redundancy avoidance agreement which the national
employers' organisation, the UCEA was, as Labour Research went to press, still refusing
to sign.
A national ballot for strike action by the UCU lecturers' union has been deferred until the
autumn term, following legal challenges.
Two thirds of all universities are said to be considering job cuts, despite a high level of demand
for higher education places and national funding settlements well above inflation. The UCU
accuses universities and colleges of cutting departments that actually generate surplus or
have excellent teaching and research, in response to the government's agenda on
specialisation.
Cardiff University is planning to axe 140 jobs and 250 courses. Stratchclyde University
has plans to get rid of 140 staff, while London Metropolitan University (LMU) is proposing
to axe at least 550 jobs, which equates to 800 staff actually at risk (one quarter of the
workforce).
The university has been hit by funding cuts and repayment demands totalling millions
of pounds following inacurate reporting of the numbers of students completing courses.
LMU unions also warn of continued outsourcing and privatisation, and attacks on union
reps, and say it could mean the "beginning of the end" for the university.

Précarisation des enseignants, UK

Dans l'Independent : Teachers face the sack in 5-year licence plan.