jeudi 4 décembre 2014

Enjeux des sciences / capitalist world-system : déglobaliser les savoirs

Wallerstein, dans le texte clé, « Typology of Crises », Geopolitics and Geoculture, 1991 : que la science, comme « modernité », a été vecteur du système-monde capitaliste, mais qu’elle hérite aussi de l’ambiguïté de la Révolution française : légitimant la nouvelle fluidité des structures politiques pour permettre le flux capitaliste mondial, mais aussi consistant en l’insurrection des protestataires à l’intensification des processus capitalistes auxquels ils étaient soumis.
La « science », comme : tout de l’empirique est connaissable ; la plus grande généralisation est la meilleure donc les lois universelles l’horizon ; et invalidation de toute autre forme de savoir, en tant que subjectif, invérifiable, sans pertinence.
(Cette généralisation, « neutralité » : aussi homogénéiser les objets de l’empirie, comme B Anderson évoque l’homogénéisation du temps linéaire acquis entre autre par l’horlogerie et les conséquences de l’imprimerie, soit les placer en système d’équivalence généralisée, comme la commodification des objets du monde, dans le régime de l’argent. Rendre possible l’échange et le processus de la généralisation : expansion continue.)
Le savoir donc, pour l’homogénéisation. Histoire parallèle avec celle de l’argent. Ici intervient, émerge, trouve tout naturellement sa place comme expression-même de : le cadre mondial. Comme spatialité de l’universel.

De cela la science des 19ème et 20ème siècles hérite la double face de légitimation et de critique, sous la forme de lutte continue pour le contrôle de la définition des tâches et des domaines des « sciences sociales historiques ». Par quoi Marx et Engels marquent leur insistance sur la caractérisation du « socialisme scientifique ».

Si le travail à mener est, critique, sur la « crise des mouvements anti-systémiques » et la « crise des sciences » (soit : que la « crise du système-monde capitaliste » elle-même aura à take care of itself, sous la tâches des capitalistes) : se fera par, s’engouffrera dans le mouvement historique de, la déconstruction de l’épistémologie de l’universel, comme système de mise en équivalence générale (= « rationalisation »). Travail de dégénéralisation, qu’on pourra sans doute travailler en s’attachant du mondial, comme trope de global. Déglobaliser. Wallestein dessine des échappées, lignes de construction du futur (comme travail du « choix humain »), en forme de « greatly increased scope for the multiplicity of cultural patterns that humanity has shown the capacity to create » (121) ; dont le processus déjà enclenché de « rediscovering [the world’s] wealth of alternative formulations of knowledge » (119) – contre les cadres de la « science », réversibilité, neutralité, généralité, lois universelles. Il invoque Prigogine et Stengers (Order Out of Chaos, 1984) pour l’attention à la physique contemporaine : time’s arrow, irreversibility, randomness ; nouvelle articulation de Being & Becoming, non plus opposés mais « express[ing] two related aspects of reality ». [Trope contemporanéiste, où Wallerstein participe aussi, marqué de la fin des 1980s, d’aller chercher des figures dans la physique et l’épistémologie : relativité, chaos, les nouveaux infinis, sur quoi on peut commencer à imaginer d’autres modèles de compréhension du changement social : autres régimes d’historicité de l’être.]
La science moderne est par là lisible comme la disciplinarisation d’une archi-idéologie, capitaliste, de l’histoire, en valence de prospective : mythe fondateur d’une éradication de l’ordre ancien comme fixiste, et du changement comme vecteur de la destruction créatrice du capitalisme ; de l’expansion et de l’accumulation.
Capitalisme et histoire. Et alors y comprendre le rôle des philosophies de l’histoire marxiennes, ou anti-systémiques plus largement. L’histoire comme vecteur du capitalisme, permettant de dégager de la valeur des déracinements – et non seulement de la critique. Evolution, et aussi révolution ; historicisme & sciences historiques, et aussi messianisme socialiste ; etc.

Dégénéraliser le savoir : pourra passer, et les chemins sont déjà ouverts par les critiques antisystémiques de l’anticolonialisme entre autres depuis l’entre-deux-guerres, par la relativité culturelle et la multiplicité des régimes de savoir. Mais quelle autre ligne de programme ? Ou quel mode exact sur cette ligne ?
Pour dégénéraliser, on pourra précisément commencer par défaire l’association entre général et mondial.

Différencier, pour déduire une autre conception de l’historicité – et dessiner une autre stratégie anti-systémique de transformation .
Wallerstein parle de travail politique (trans-zonal –  quelle actualisation à faire ici, après la reconfiguration de la tripartition West East South ?) et intellectuel. Théorique et stratégique donc. 
Ce devrait être sur une question de conception de l’histoire, et du changement. De la transformation sociale. Je ne vois pas encore où mène ce corridor. Ces paramètres à faire jouer les uns sur les autres, en tout cas.

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